La prévention de traite des êtres humains aux fins d’exploitation économique (travail dans des conditions contraires à la dignité humaine) a été déclarée établie dans le chef des sept prévenus (un Belge, quatre Bulgares et deux sociétés). Les faits se sont produits entre le 31 décembre 2004 et le 1er juillet 2012. Des condamnations ont également été prononcées pour différentes infractions au droit social et la location de chambres non conformes aux exigences. Une victime et Myria s’étaient constitués partie civile.

Cette affaire été mise au jour suite à un contrôle multidisciplinaire réalisé dans les élevages de volailles belges. Cet élevage de volailles employait une quarantaine de Bulgares. Ils l’étaient souvent de manière illégale, mais les gérants avaient également mis sur pied différentes constructions, parmi lesquelles des statuts de faux indépendant et des détachements fictifs. Par le biais de sociétés, ils tentaient de susciter un semblant de légitimité.

Les personnes mises au travail comme indépendantes étaient inscrites comme associées dans l’une des sociétés belges dont il est plus tard apparu que le premier prévenu était l’initiateur. Elles savaient généralement dans quelle entreprise elles étaient associées, mais ne savaient pas où se trouvait le siège social, quel était le but social ni combien de parts de la société elles possédaient. Les prévenus utilisaient également des formulaires de détachement fictifs. Les ouvriers ne parlaient généralement pas ou mal le néerlandais, et cette méconnaissance était exploitée. Le principal prévenu a affirmé de pied ferme qu’il était victime de l’absence d'une réglementation adéquate pour l’activité d’élevage de volailles et qu'il avait donc été dans l’obligation de commettre des infractions à la législation sociale. Il a souligné qu’il s’agissait bel et bien d'un emploi illégal, en violation de la législation sociale, mais qu’il n’était pas question d’exploitation. Il est également ressorti du dossier que le principal prévenu et/ou les membres de sa famille recherchaient de manière spécifique des personnes d’origine bulgare pour venir travailler pour lui ou l’une de ses sociétés en Belgique. Les ouvriers, qui devaient s’acquitter du loyer, occupaient une habitation déclarée ultérieurement insalubre par l’inspection du logement. Ils étaient souvent employés de manière illégale ou détachés (fictivement) depuis la Bulgarie ou encore travaillaient comme faux indépendants.

Les déclarations faites par les victimes concernant les rémunérations étaient contradictoires. Un groupe maintenait qu'il gagnait 12 euros de l’heure et qu'il prestait environ 17 heures par semaine. D’autres déclaraient gagner 10 euros de l’heure et qu'il arrivait souvent qu'ils n’étaient pas payés car il n’y avait plus d’argent. Le tribunal a par conséquent estimé qu'il était clairement question de récits concertés. Un éleveur de volailles externe déclara que d’après lui, les ouvriers gagnaient environ 6 euros de l’heure. Il ressort de documents retrouvés chez les prévenus lors de la perquisition que les ouvriers devaient prester bien plus d’heures que ce qu'ils affirmaient. Le travail proprement dit impliquait un travail assez physique qui n'était pas sans danger en raison de l’odeur d’ammoniaque des poulets et qui devait souvent se faire de nuit. Lors de la détermination des peines, le tribunal a tenu compte du fait que les ouvriers ne se considéraient pas comme des victimes et ce, en raison de leurs conditions de vie précaires dans leur propre pays et des affinités culturelles avec celui-ci. Un autre élément est la concurrence déloyale qui est apparue, vu que l’entreprise du prévenu s’avérait toujours la moins chère. Le tribunal a également constaté qu'il était question d'un dépassement limité du délai raisonnable concernant la procédure.

Le prévenu principal a été condamné à une peine d’emprisonnement de cinq ans (avec sursis partiel) et à une amende de 110.000 euros. Les autres prévenus ont été condamnés à une peine d’emprisonnement variant de dix-huit mois à trois ans, avec sursis, et à une amende de 5.500 euros à 13.750 euros. Les sociétés ont été condamnées à des amendes de respectivement 11.000 et 13.750 euros. Des sommes de 50.849,95 à 1.423.798,73 euros inclus ont été confisquées. Myria a obtenu un 1 euro symbolique à titre d’indemnisation. Une victime s’était constituée partie civile et a reçu 200 euros.

Ce jugement a été partiellement réformé par la cour d’appel d’Anvers dans un arrêt du 13 novembre 2019.