Dans ce dossier de trafic d’êtres humains, neuf prévenus étaient poursuivis en tant qu’auteurs ou co-auteurs de trafic d’êtres humains et tentative de trafic d’êtres humains avec circonstances aggravantes entre novembre 2019 et juillet 2020. Ils étaient également poursuivis pour avoir participé à la prise de décision, à la préparation ou à la réalisation des activités d’une organisation criminelle, et pour séjour illégal.

Il s’agissait d’une organisation composée principalement d’hommes de nationalité soudanaise. Ils étaient très actifs dans la région bruxelloise et sur les parkings autoroutiers près d’Arlon, à proximité de la frontière avec le Grand-Duché de Luxembourg. Le parc Maximilien à Bruxelles servait de lieu de recrutement de migrants de transit pour rejoindre le Royaume-Uni à des montants allant de 700 à 1.200 euros selon le profil du migrant. De Bruxelles, les migrants étaient emmenés vers les parkings près d’Arlon où ils étaient chargés dans des camions. Tant les passeurs que les candidats au départ restaient parfois plusieurs jours dans les parkings, sous tente.

Une enquête de téléphonie a été réalisée (rétrozollers, analyse des trafics des antennes de transmission et mesures d’écoute). Dix numéros ont été mis sur écoute. Des observations ont été effectuées à la gare du Nord et sur le parking autoroutier, ainsi que des perquisitions.

Deux victimes féminines, accompagnées par PAG-ASA, ont fait des déclarations à la police. Elles ont déclaré que le prévenu principal les avait chacune menacées de violence et harcelées sexuellement à différents moments. Une des filles a même été blessée. Elles ont pu désigner plusieurs passeurs sur des photos.

Le tribunal a considéré qu’il existait une relation très bien structurée et organisée entre les prévenus, avec une répartition claire des tâches entre le grand nombre de membres (dirigeants, recruteurs, aidants à l’embarquement, etc.). L’organisation matérielle (répartition des camps de tentes sur le parking, distribution de tickets, organisation d’un flux constant de victimes, collecte d’argent, tentatives multiples en cas d’interception des candidats, etc.), la constance de l’organisation et la fréquence systématique et élevée de la commission des infractions sont autant d’éléments qui démontrent l’existence d’une organisation criminelle bien organisée, distincte d’une association. Les faits ont été commis d’un commun accord. Les conversations enregistrées révèlent également que plusieurs membres transféraient de l’argent à l’étranger.

Le tribunal a estimé que les faits de trafic d’êtres humains étaient établis, avec circonstances aggravantes.

Deux prévenus ont également été condamnés en tant que dirigeants de l’organisation criminelle. Ils déterminaient quand aller sur les parkings, qui pouvait y aller et combien de personnes pouvaient y embarquer. Ils ont été condamnés à des peines de prison de respectivement cinq ans et quarante mois et à des amendes de 1.644 et 832 euros. Cinq prévenus ont également été condamnés pour avoir participé à la prise de décision au sein de l’organisation criminelle. Ils collectaient l’argent, négociaient le prix. Ils ont été condamnés à des peines de prison de quatre ans et à des amendes allant de 1.456 à 10.192 euros. Deux prévenus ont été condamnés pour avoir participé à la préparation ou à la mise en œuvre d’activités. Ils ont aidé à embarquer dans le camion et ont effectué les tâches qui leur ont été confiées par les autres membres. Ils ont été condamnés à trente mois de prison et à des amendes de 8.320 et 8.944 euros.

Des peines distinctes ont été prononcées pour la prévention de séjour illégal et tous les prévenus ont écopé d’une peine de prison de trois mois.

Plusieurs prévenus et le parquet ont interjeté appel.

La cour d’appel de Bruxelles a confirmé en grande partie le jugement dans un arrêt du 15 octobre 2021. La peine du principal prévenu et les amendes ont été confirmées. Pour les autres prévenus, la peine de prison a été réduite.