Tribunal correctionnel de Mons, 21 avril 2016
Trois prévenus et une société étaient poursuivis pour traite des êtres humains aux fins d’exploitation économique à l’égard de nombreux travailleurs roumains. Le prévenu principal était également poursuivi pour faux en écriture et marchands de sommeil. Trois travailleurs s’étaient constitués partie civile, de même que Myria.
Le dossier a été initié suite au dépôt de plainte à la police d’un ouvrier roumain qui a dénoncé ses conditions de travail, ainsi que celles de plusieurs autres compatriotes. Ils avaient répondu à une annonce dans un journal roumain, en vue de travailler en Belgique. La deuxième prévenue intervenait comme intermédiaire pour le recrutement. Il leur avait été promis d’être payés 7 euros de l’heure le premier mois et ensuite 8 euros. Le logement serait également fourni, à raison de 150 euros de loyer. Les frais de voyage et le premier mois de loyer seraient retirés du salaire après un mois de travail complet.
Une fois arrivés en Belgique, ils ont été confrontés à des conditions de logement et de travail déplorables : 6 jours sur 7 à raison de 8 à 12 heures par jours ; les rémunérations promises n’ont par ailleurs pas été payées. Les ouvriers disposaient par ailleurs du statut d’associé actif, statut dont ils n’avaient pas été informés et étaient dans l’ignorance des conséquences de celui-ci, ne comprenant pas les documents qu’il leur était demandé de signer. Le principal prévenu effectuait l’ensemble des tâches de direction, les ouvriers roumains étant cantonnés à des tâches de pure exécution, sous son autorité. Le tribunal en a donc déduit que le statut d’associé actif était un statut qui ne correspondait pas à la réalité, les ouvriers venus de Roumanie étant manifestement dans les liens d’un contrat de travail.
Le tribunal a retenu l’ensemble des préventions reprochées à l’égard du prévenu principal: le salaire proposé était largement inférieur au salaire minimum, le nombre important d’heures prestées et l’absence de paiement du salaire constituent des conditions de travail contraires à la dignité humaine. Le tribunal a également relevé qu’il importe peu que les ouvriers roumains consentent à ce salaire, ce dernier pouvant apparaître plus que satisfaisant à leurs yeux, vu la pauvreté notoire de la Roumanie à l’époque des faits.
Il a également retenu la prévention de traite à l’égard de la co-prévenue : elle servait d’intermédiaire dans le recrutement de la main d’œuvre pour le compte du prévenu principal dans ces mauvaises conditions et a donc permis, en connaissance de cause, la mise au travail dans des conditions contraires à la dignité humaine des ouvriers ainsi recrutés. Quant au troisième prévenu, il a également été condamné : il a notamment transporté les ouvriers et surveillé le chantier.
La prévention de marchands de sommeil a également été déclarée établie : les immeubles loués étaient surpeuplés et étaient insalubres : ils ont donc été mis à disposition de certains ouvriers dans des conditions contraires à la dignité humaine. L’intention de réaliser un profit anormal résulte du fait de l’exigence même d’un loyer alors que le bâtiment est impropre à la location et de la multiplicité des loyers perçus.
La partie civile qui était présente s’est vue octroyer la somme de 2.000 euros à titre de réparation du dommage lié à la prévention de traite des êtres humains. Myria a reçu un euro définitif.
Ce jugement est définitif.