Onze prévenus dont des personnes de nationalité nigériane, haïtienne, togolaise, belge et turque, comparaissaient notamment pour traite des êtres humains à des fins d’exploitation de la prostitution ou d’autres formes d’exploitation sexuelle. Et ce avec les circonstances aggravantes suivantes  : minorité de la victime, abus de la situation vulnérable de la victime, usage de la contrainte, mise en danger délibérément ou par négligence grave de la vie de la victime et activité habituelle. Plusieurs prévenus ont également comparu pour proxénétisme hôtelier et implication dans une organisation criminelle. Il s’agissait d’un réseau nigérian particulièrement bien organisé. Myria s’était constitué partie civile dans ce dossier.

La police judiciaire fédérale de Bruxelles a appris que dans le milieu de la prostitution africain, une prostituée nigériane très connue appelée Mama L. (première prévenue), exploiterait une quinzaine de jeunes filles nigérianes dans la prostitution, dont certaines seraient probablement des mineures. La situation durerait depuis quelques années. Elle gèrerait également de manière officieuse plusieurs carrées où elle arrivait personnellement à un accord avec les propriétaires. La police a également appris qu’elle exploitait sexuellement plusieurs filles selon le système Yemeshe. L’organisation se chargeait donc d'une part de l’acheminement de jeunes filles du Nigeria en vue de leur exploitation sexuelle et d’autre part de l’exploitation de la prostitution de très nombreuses jeunes filles dans le quartier de la prostitution bruxellois.

La première prévenue avait recruté la majorité des filles au Nigeria, avec l’aide de son frère séjournant sur place. Elles étaient attirées par des fausses promesses comme des études. De cette façon, les victimes étaient transportées clandestinement du Nigeria vers l’Italie par la route de Libye. En Italie, elles séjournaient dans des camps de réfugiés. Depuis l’Italie, les jeunes filles étaient conduites en Europe par un homme qui venait les chercher en voiture. Elles devaient cependant d’abord passer par le centre d’asile de Lille, en France, et ce afin d'initier une procédure d’asile et bénéficier d’une protection temporaire contre un éventuel rapatriement dans leur pays d’origine.

Il est ressorti des différentes déclarations des victimes qu’elles avaient déjà subi un rituel vaudou au Nigeria lors duquel elles avaient juré ne pas s’enfuir et rembourser la somme totale du voyage à la première prévenue, de quelques 35.000 euros. L’une des victimes était encore mineure et ne pouvait en aucun cas révéler son âge véritable. Une fois les victimes arrivées à Bruxelles, elles étaient directement conduites vers leur lieu de travail et forcées à se prostituer. En cas de refus, elles étaient soumises à des violences physiques. La première prévenue passait en effet chaque jour dans l’habitation des filles pour récupérer l’argent et s’assurait toujours bien qu’elles ne cachaient rien.

L’enquête avait également trait à différentes déclarations de témoins dans lesquelles il est apparu que la première prévenue exerçait une énorme pression sur les filles. Les membres de leur famille au Nigeria étaient également menacés par son entourage. Il était par conséquent question de violence envers les filles et d'usage de la contrainte psychologique. Le deuxième prévenu agissait en tant que chauffeur de « taxi noir ». Les écoutes téléphoniques ont confirmé ce qui vient d’être décrit. La première prévenue brandissait la menace de lourdes représailles si les filles s’enfuyaient et ne remboursaient pas leur dette. Il est par exemple apparu que la mère de la victime mineure avait été enfermée et sévèrement punie. Cette victime a plus tard déclaré que son frère était mort dans des circonstances mystérieuses.

Lors de l’appréciation des faits par le tribunal, il est apparu que la première prévenue occupait une fonction dirigeante dans un réseau criminel extrêmement bien organisé. Les éléments suivants ont permis au tribunal d’en arriver à cette conclusion : le contexte international, le grand nombre de victimes, la collaboration entre différentes personnes, la concertation permanente pour organiser le voyage des filles et régler les activités de prostitution, le changement fréquent de numéros d’appel, l’utilisation d'un langage codé et l’incitation au silence pendant les différents entretiens. Tous les prévenus ont été jugés coupables de différentes préventions, à l’exception d'un prévenu qui a été acquitté. Toutes les circonstances aggravantes citées dans la prévention de traite des êtres humains ont par conséquent été retenues.

Lors de la fixation de la peine, il a uniquement été tenu compte des victimes identifiées afin d’éviter un double comptage. La première prévenue a été condamnée à une peine d’emprisonnement de quatorze ans et à une amende de 240.000 euros (trente victimes identifiées). Une somme de 624.250 euros a également été confisquée. Les deuxième au septième prévenus ont été condamnés à une peine d’emprisonnement entre quarante mois et huit ans assortie d'une amende de 8.000 à 128.000 euros. Les trois autres prévenus qui étaient propriétaires des carrées ont chacun été condamnés à une peine d’emprisonnement de deux ans avec sursis et à une amende de 4.000 euros.

Pour la première prévenue, une somme de 624.250 euros a été confisquée, ainsi que la voiture qu'elle utilisait pour se rendre dans le quartier de la prostitution dans le cadre de ses activités criminelles. En ce qui concerne les autres prévenus, des sommes oscillant entre 1.880 et 63.100 euros ont été confisquées. Dans ce dossier, une confiscation de trois biens immobiliers a également été prononcée. Cependant, seule une petite partie de chaque bien (les « carrées ») a pu être confisquée étant donné que seule cette partie du bien était louée à des fins de prostitution dans le but de réaliser un profil anormal. Myria s’est constitué partie civile dans ce dossier et a reçu un dédommagement matériel et moral de 500 euros.

Cette décision a été globalement confirmée par la cour d’appel de Bruxelles dans un arrêt du 3 avril 2019.