Cour d’appel de Bruxelles, 27 septembre 2018
Quatre prévenus irakiens ont été cités à comparaître pour trafic d’êtres humains.
Le dossier a été initié lorsque la police s’est lancée un soir à la poursuite d'une camionnette qui avait emprunté une partie de la route en sens inverse. Pendant la poursuite, le conducteur tenta de faire sortir de la route plusieurs véhicules de police. Le conducteur a ensuite perdu le contrôle de la camionnette, le véhicule a été projeté en l’air, se retourna plusieurs fois avant de s'immobiliser sur le flanc, sur le bord de la route. Il est apparu que seize personnes se trouvaient à bord. Elles ont toutes dû être conduites à l’hôpital. Parmi elles, il y avait treize blessés graves et trois blessés légers. La vie de deux enfants était en danger. Il s’agissait tous de migrants de transit souhaitant rejoindre le Royaume-Uni. Il est directement apparu qu'il s’agissait d'un transport réalisé par quatre passeurs, douze personnes étant transportées du camp de Dunkerque en Belgique pour y prendre un camion à destination du Royaume-Uni. Après diverses auditions, le rôle de chacun dans le transport est clairement apparu. Les victimes ont déclaré avoir payé entre 2.000 et 9.000 dollars par personne pour rejoindre le Royaume-Uni.
Plusieurs victimes avaient déjà fait une ou plusieurs tentatives pour rejoindre le Royaume-Uni. Les prévenus ont déclaré lors de leurs arrestations n’avoir aucun lien avec le trafic d’êtres humains et en être les victimes. Il est ressorti de l’enquête que le premier prévenu était une aide des passeurs. Il devait notamment vérifier si les camions étaient accessibles ou non. Le deuxième prévenu accompagnait les personnes dans le bois, les aidait à monter dans le camion et les contrôlait également. Le troisième prévenu était le chauffeur de la camionnette, ce qu'il nia fermement. Le quatrième prévenu a été identifié comme le principal passeur, le responsable. Les autres passeurs devaient lui rendre compte. L’enquête se composait également d’écoutes téléphoniques et d'une analyse ADN, par le biais de laquelle des cheveux trouvés sur une perruque portée par le conducteur ont été comparés aux profils de référence des suspects. Cet échantillon a confirmé que le troisième prévenu était bel et bien le chauffeur.
Dans un jugement du 6 février 2018, le tribunal correctionnel néerlandophone de Bruxelles avait estimé que la prévention de trafic d’êtres humains était établie, ainsi que plusieurs circonstances aggravantes, à savoir la minorité de trois victimes, l’abus de la situation vulnérable, la participation à une organisation criminelle et le fait que l’activité constitue une activité habituelle.
Au vu des rôles diversifiés des prévenus, des peines différentes ont été prononcées.
Plusieurs prévenus et le ministère public ont interjeté appel contre le jugement.
Dans son arrêt, la cour d’appel n’a pas suivi les prévenus qui affirmaient être également des victimes de passeurs. L’un des prévenus a maintenu dans sa défense qu'il n’avait nullement tiré, que ce soit directement ou indirectement, un avantage patrimonial de ses activités. La cour a cependant estimé qu'il mettait ses services à la disposition de l’organisation criminelle en échange d’un transport gratuit vers le Royaume-Uni. La cour a toutefois estimé qu’il avait joué un rôle moins important que les autres passeurs vu qu'il n’avait aucun pouvoir de décision.
En ce qui concerne les peines, la cour a confirmé les peines du premier juge, sauf en ce qui concerne le troisième prévenu. Pour ce dernier, la peine infligée en première instance a été jugée insuffisante eu égard au contexte. Sa peine a été portée à une peine d’emprisonnement de sept ans.