[Communiqué de presse] 2022 : une dynamique exceptionnelle dans la migration économique, replacer le curseur sur les droits des travailleurs
La migration économique est en forte augmentation. En 2022, 8.098 visas long séjour ont été accordés à des ressortissants de pays tiers pour raisons professionnelles, tant à des salariés qu’à des indépendants. C’est 46% de plus qu’en 2021 et bien plus qu’avant la pandémie. Les principaux bénéficiaires sont Indiens (23%), Turcs (15%), Marocains (6%) et Tunisiens (5%).
Cette augmentation est encore plus marquée pour les permis uniques. En 2022, 19.721 permis ont été délivrés à des salariés ressortissants de pays tiers, toutes régions confondues (premières demandes et renouvellements). C’est une augmentation de 75% par rapport à 2021. On y constate une autre évolution remarquable : en 2022 la proposition des profils peu ou moyennement qualifiés a sensiblement augmenté. Traditionnellement, les permis uniques sont en effet majoritairement délivrés à des travailleurs hautement qualifiés. Récemment, les permis uniques servent de plus en plus pour des travailleurs qui occupent des emplois moyennement qualifiés en pénurie ainsi que pour des travailleurs qui sont soumis à l’étude du marché du travail.
L’augmentation du nombre de permis uniques doit s’accompagner de garanties supplémentaires pour les travailleurs
Myria constate cependant que des garanties supplémentaires devraient être mises en place concernant les permis uniques. Premièrement, le travailleur doit être moins dépendant de son employeur et de son emploi. Dans le cadre du permis unique, le travailleur est en effet tenu de travailler dans un poste particulier chez un employeur déterminé ce qui peut mener à des situations d’exploitation.
D’autre part, il faut une procédure de demande plus transparente pour le candidat travailleur. Ce dernier devrait, selon Myria, avoir accès à son dossier électronique et à l’information sur l’état de sa demande. De telles mesures peuvent efficacement mener à plus de protection contre des abus par des employeurs mal intentionnés.
Au niveau européen, une proposition de révision de la directive sur le permis unique a été lancée en 2022. Myria appelle à mettre en place un cadre réglementaire européen plus transparent et plus uniforme et à renforcer les droits des travailleurs migrants.
Par ailleurs et pour la même année, ce sont 214.062 personnes qui ont été détachées en Belgique. Il s’agit de 7% de plus qu’en 2021, mais cela reste en dessous du niveau avant la pandémie de COVID-19. Il s’agit principalement de citoyens de l’UE (78%), mais la part de ressortissants de pays tiers augmente remarquablement (21% en 2022 contre 9% en 2017).
Myria constate que l’augmentation récente des détachements depuis les pays tels que la Pologne, le Portugal et la Slovénie est principalement due à l’augmentation du nombre de ressortissants de pays tiers (Ukrainiens, Biélorusses, Brésiliens, Bosniaques) qui sont détachés de ces pays vers la Belgique. Cela pourrait illustrer le remplacement (partiel) des ressortissants nationaux détachés par des ressortissants de pays tiers.
Les conclusions de Myria confirment les résultats des précédentes recherches selon lesquelles le détachement est devenu un canal de mobilité important pour les ressortissants de pays tiers. Les ressortissants de pays tiers détachés étant plus vulnérables à l'exploitation que les citoyens de l'UE détachés, ils ont dès lors besoin de toute urgence d’une protection juridique accrue. Myria reviendra sur ce sujet plus tard dans l’année.
En 2022, 10.367 visas long séjour ont été accordés pour raisons d’études, c’est un peu moins qu’en 2021 (-4%). Ils l’ont été principalement à des Chinois (11%), Marocains (9%), Camerounais (8%), Turques (6%) et Indiens (5%).
Depuis 2022, les étudiants étrangers peuvent, après avoir terminé leurs études, disposer d’un titre de séjour d’un an pour chercher du travail ou créer leur entreprise. S’ils y parviennent, ils peuvent ensuite, sous certaines conditions, obtenir le statut de travailleur migrant. Ceux qui ont fait cette demande de changement de statut (de l’année de recherche vers celui de travailleur migrant) ont récemment été confrontés à des retards importants dans le traitement par l’administration de leur demande. En conséquence : certains se sont retrouvés en séjour irrégulier, faute de réponse à temps de l’administration. Face à ce constat, Myria plaide pour un traitement plus fluide et dans les délais des demandes de changement de statut. Il recommande, durant le traitement de la demande, de délivrer un document de séjour temporaire (annexe 15) afin d’éviter que les personnes ne se retrouvent en séjour irrégulier en cas de traitement tardif.
Rapport annuel La Migration en chiffres et en droits 2023